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07.01.2022Erwan Prely, Sandra Strittmatter

Décryptage – Propriété intellectuelle – Janvier 2022

Extension du régime de dévolution automatique des droits de propriété intellectuelle applicable aux salariés, aux logiciels et inventions créés par des non-salariés (stagiaires) – Ordonnance n° 2021-1658 du 15 décembre 2021

En matière de droit de la propriété intellectuelle, le droit français désigne, en principe, l’inventeur ou l’auteur comme titulaire des droits de propriété intellectuelle sur son invention ou sa création.

Seuls les logiciels et les inventions créés par des salariés ou des agents publics étaient soumis à un régime dérogatoire. Celui-ci prévoyait une dévolution automatique des droits de propriété intellectuelle au profit de l’employeur lorsque l’invention découlait d’une mission inventive matérialisée dans un contrat de travail ou encore lorsque le logiciel était créé dans l’exercice des fonctions du salarié ou d’après les instructions de l’employeur.

Cette dévolution automatique n’était donc pas applicable au personnel non-salarié pouvant également participer à l’activité inventive ou créative, tels que les stagiaires, les doctorants étrangers, les professeurs ou encore les directeurs émérites.

Face à cette différence de traitement et afin de mettre fin aux incertitudes de la jurisprudence, l’Ordonnance n° 2021-1658 du 15 décembre 2021 harmonise le traitement des personnes participant aux efforts de recherche et renforce donc la sécurité juridique en clarifiant leurs droits.

A cet effet, deux nouveaux articles font leur apparition dans le Code de la propriété intellectuelle : l’article L. 113-9-1 délimite le régime s’appliquant aux logiciels et l’article L. 611-7-1 celui s’appliquant aux inventions.

L’article L. 113-9-1 prévoit donc une dévolution automatique des droits patrimoniaux sur les logiciels créés par des non-salariés à la personne morale (de droit public ou privé) réalisant de la recherche sous réserve que :

  • L’auteur du logiciel soit accueilli dans le cadre d’une convention et que celui-ci soit placé sous l’autorité d’un responsable de la structure ;
  • La création du logiciel soit effectuée dans le cadre de sa mission ou d’après les instructions de la structure et moyennant une contrepartie financière (par exemple une indemnité de stage) ou matérielle.

L’article L. 611-7-1 prévoit, quant à lui, une dévolution automatique des droits de propriété intellectuelle sur les inventions réalisées par l’inventeur non-salarié à la personne morale (de droit public ou privé) réalisant de la recherche sous réserve que :

  • L’inventeur soit accueilli dans le cadre d’une convention ;
  • L’invention soit réalisée dans le cadre d’une mission inventive correspondant à ses missions effectives ou d’études et de recherches explicitement confiées à l’inventeur.

L’application de ces deux régimes soulève une autre subtilité : le nouvel article L. 113-9-1 s’applique uniquement aux non-salariés recevant une contrepartie alors que l’article L. 611-7-1 concerne, lui, tous les non-salariés recevant une contrepartie ou non. Néanmoins, les inventeurs non-salariés ne sont pas dépourvus de toute contrepartie puisqu’ils doivent percevoir une somme supplémentaire, prenant la forme d’une contrepartie financière ou d’un juste prix (en cas d’invention hors mission attribuable), pour la réalisation de l’invention.

Désormais, il n’existe donc plus de différence de traitement entre les salariés et les non-salariés accueillis au sein d’une personne morale réalisant de la recherche : la titularité des droits de propriété intellectuelle sur une invention ou un logiciel réalisé dans le cadre des missions et activités qui leur sont confiées revient à la personne morale.