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27.06.2019Anne-Solène Hardouin, Jean-Philippe Minaud, Jérome Michel

Newsletter Droit public – Juin 2019

Commande publique

L’article L. 2141-7 du code de la commande publique en vigueur depuis le 1er avril 2019 (qui reprend les dispositions de l’article 48 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015) précise que :

« L’acheteur peut exclure de la procédure de passation d’un marché les personnes qui, au cours des trois années précédentes, ont dû verser des dommages et intérêts, ont été sanctionnées par une résiliation ou ont fait l’objet d’une sanction comparable du fait d’un manquement grave ou persistant à leurs obligations contractuelles lors de l’exécution d’un contrat de la commande publique antérieur ».

Interrogé sur l’interprétation à retenir de l’article 48 de l’ordonnance, le ministre de l’économie et des finances considère qu’un candidat ayant été sanctionné par un acheteur tiers dans le cadre de l’exécution d’un autre marché peut être exclu de la procédure de passation.

Il rappelle cependant que cette exclusion n’est qu’une simple faculté pour l’acheteur et qu’elle ne pourrait intervenir qu’après que le candidat aura été mis à même « de présenter ses observations afin d’établir dans un délai raisonnable et par tout moyen qu’il a pris les mesures nécessaires pour corriger les manquements » [1].

Enfin, le ministre précise que le mécanisme du droit à l’erreur [2] ne trouve pas à s’appliquer dans cette hypothèse.

Une courte proposition de loi visant un meilleur accès des PME à la commande publique a été déposée au Sénat le 4 avril 2019. La discussion en séance publique aura lieu le 13 juin 2019.

 A titre d’exemple, l’article 1er de la proposition de loi vise à réaffirmer le caractère obligatoire de l’allotissement.

L’article 2 prévoit que :

  • les acheteurs pourraient avoir recours à prestataire extérieur pour coordonner la gestion d’un marché alloti ; et
  • le recours au marché global serait limité à la seule la difficulté « manifeste » de recourir à un marché alloti.

 

Domanialité

Le droit de délaissement permet notamment au propriétaire d’un terrain, situé dans un emplacement réservé par le PLU, de solliciter de la commune qu’elle acquière le bien [3].

À l’inverse, le propriétaire exproprié d’un bien qui n’est pas utilisé dans les 5 ans, pour l’opération ayant donné lieu à l’expropriation, bénéficie d’un droit de rétrocession de son bien [4].

La Cour de cassation se prononce en l’espèce sur l’articulation entre ces deux procédures.

À cet égard, elle rappelle, dans un premier temps, que la rétrocession ne peut, en principe, être mise en œuvre si le propriétaire a exercé son droit de délaissement [5].

Cependant, dans un second temps, la cour vient tempérer ce principe par l’appréciation in concreto de l’absence d’atteinte au droit au respect des biens [6].

En l’espèce, un terrain inconstructible, situé dans un emplacement réservé par le PLU et destiné à l’implantation d’espaces verts, avait été délaissé moyennant un prix de 121 960 €.

Or, le projet initial d’implantation d’espaces verts a été abandonné et les règles d’urbanisme de la commune ont été modifiées en ce sens, rendant le terrain constructible. Le terrain a ensuite été revendu pour 5 320 000 €.

La Cour de cassation considère que, dans ces conditions, cette opération « porte une atteinte excessive au droit au respect des biens » du propriétaire initial.

 

Urbanisme

  • Décrets d’application de la loi ELAN
    • Décret n° 2019-474 du 21 mai 2019

La dernière version de l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme, tel que modifié par la loi ELAN, prévoit notamment que :

« Toute action ou opération d’aménagement faisant l’objet d’une évaluation environnementale doit faire l’objet d’une étude de faisabilité sur le potentiel de développement en énergies renouvelables de la zone, en particulier sur l’opportunité de la création ou du raccordement à un réseau de chaleur ou de froid ayant recours aux énergies renouvelables et de récupération. Un décret en Conseil d’Etat détermine les modalités de prise en compte des conclusions de cette étude de faisabilité dans l’étude d’impact prévue à l’article L. 122-3 du code de l’environnement ».

À cet effet, le décret du 21 mai 2019 modifie l’article R. 122-5 VII du code de l’environnement, en venant préciser que l’étude d’impact (visée par l’article L. 300-14 du code de l’urbanisme doit inclure :

  • L’étude de faisabilité,
  • Les conclusions de celle-ci, et
  • La description de la façon dont il a été tenu compte de l’étude de faisabilité dans l’étude d’impact.
    • Décret n° 2019-505 du 23 mai 2019

La loi ELAN a modifié l’article L. 423-1 du code de l’urbanisme pour ouvrir la possibilité aux communes et aux EPCI de confier l’instruction des demandes d’autorisation d’urbanisme à des prestataires privés.

A cet effet, le décret du 23 mai 2019 ajoute un alinéa à l’article R. 423-15 du code de l’urbanisme (listant les autorités compétentes en charge de l’instruction d’une demande de permis de construire ou de déclaration préalable de travaux) afin d’y inclure ces prestataires privés.

  • Compatibilité d’un projet photovoltaïque au sol avec une zone agricole

La cour administrative de Bordeaux se prononce sur la possibilité de créer un parc photovoltaïque au sol dans une zone non urbanisée d’une commune sans document d’urbanisme.

S’agissant des parties non urbanisées, l’article R. 111-14 du code de l’urbanisme précisait (dans sa rédaction alors en vigueur), qu’une autorisation d’urbanisme pouvait être refusée si le projet compromet l’activité agricole.

Pour apprécier si un projet « compromet l’activité agricole » ou non, il est nécessaire d’apprécier si ce projet permet effectivement l’exercice (ou le maintien) d’une activité agricole significative sur la zone.

Le conseil d’État a dégagé, dans sa jurisprudence Photosol [7], une grille de lecture de ce caractère significatif de l’activité agricole en précisant qu’il faut tenir compte notamment :

  • des activités déjà exercées dans la zone,
  • de la superficie de la parcelle,
  • de l’emprise du projet, ou encore
  • de la nature du sol.

En l’espèce, la cour administrative d’appel de Bordeaux fait une application de ces critères et considère notamment que :

  • la valeur agricole des terres sur lesquelles s’appuierait le projet est moyenne à très faible ; ou
  • les installations envisagées permettraient « la libre déambulation des ovins».

Elle conclue donc à la compatibilité du projet de centrale solaire au sol avec la zone d’implantation.

 

[1] Article L. 2141-11 du code de la commande publique.

[2] Article L. 123-1 du code des relations entre le public et l’administration.

[3] Article L. 152-2 du code de l’urbanisme.

[4] Article L. 421-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

[5] Ccass, civ. 3ème, 26 mars 2014, n° 13-13.670.

[6] Article 1er du protocole additionnel à la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

[7] CE, 8 février 2017, n° 395464.