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16.12.2022Edouard Olson, Jérome Michel

Newsletter Energie – Décembre 2022

Le Conseil de l’Union européenne adopte des mesures temporaires d’urgence visant à accélérer le déploiement d’énergies renouvelables.

Proposition de règlement du conseil de l’Union européenne n° 2022/0367 établissant un cadre en vue d’accélérer le déploiement des énergies renouvelables

Dans le contexte de hausse des prix de l’énergie liée au conflit ukrainien, la commission européenne a, sur le fondement de l’article 122 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) [1], proposé le 9 novembre dernier au conseil de l’Union européenne d’adopter un règlement d’urgence visant à accélérer et simplifier les procédures d’autorisation de projets d’énergies renouvelables.

Adopté par le conseil de l’Union européenne le 24 novembre, ce règlement d’urgence s’inscrit dans la continuité du plan « REPowerUE » annoncé en mai 2022 et prévoit :

  • l’introduction d’une présomption simple de caractère d’intérêt public supérieur et d’intérêt pour la santé et la sécurité publiques pour les projets de planification, de construction et d’exploitation d’installations de production d’énergies renouvelables à l’occasion des évaluations environnementales prévues par les directives 92/43/CEE, 2000/60/CE, 2009/147/CE et 2009/147/CE ;
  • la fixation d’un délai maximum d’un mois pour la procédure d’octroi de permis pour l’installation d’équipements photovoltaïques lorsque ces installations sont situées sur des structures artificielles ou ont une capacité inférieure à 50 kW, ainsi que leur exemption de réalisation de certaines évaluations environnementales ;
  • la fixation d’un délai de six mois maximum pour la procédure de rééquipement des centrales électriques utilisant des sources d’énergie renouvelables en tenant compte de l’évaluation environnementale ainsi que l’octroi dans un délai d’un mois du permis relatif au raccordement au réseau de transport ou de distribution lorsque le rééquipement entraîne un accroissement de la capacité de production n’excédant pas 15 % ;
  • la fixation d’un délai de trois mois maximum s’agissant de l’octroi de permis pour l’installation de pompes à chaleur.

Ces dispositions sont applicables pour une durée d’un an renouvelable. D’ici là, le Conseil et le Parlement européen poursuivront leurs travaux de révision de la directive (UE) 2018/2001 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables (« RED II »).

 

La création d’un régime contentieux spécifique aux installations de production d’énergies renouvelables autres que l’éolien

Décret n° 2022-1379 du 29 octobre 2022 relatif au régime juridique applicable au contentieux des décisions afférentes aux installations de production d’énergie à partir de sources renouvelables (hors énergie éolienne) et aux ouvrages des réseaux publics de transport et de distribution d’électricité

Avant même la fin de la discussion parlementaire sur le projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables [2], le gouvernement a adopté un décret le 29 octobre dernier afin de créer un nouveau régime contentieux particulier applicable aux décisions relatives aux installations de production d’énergie à partir de sources d’énergies renouvelables (hors éolien), ainsi qu’aux ouvrages des réseaux publics de transport et de distribution d’électricité.

Il s’agit du troisième régime contentieux particulier applicable aux installations de production d’énergies renouvelables aux côtés des régimes spécifiques applicables à l’éolien terrestre et à l’éolien en mer, régis respectivement par le décret n° 2018-1054 du 29 novembre 2018 codifié à l’article R. 311-5 du code justice administrative et par le décret n° 2021-282 du 12 mars 2021 codifié à l’article R. 311-1-1 du code de justice administrative.

Ce nouveau régime contentieux est applicable aux décisions prises entre le 1er novembre 2022 et le 31 décembre 2026 afférentes aux installations suivantes :

  • les installations de méthanisation de déchets non dangereux ou de matière végétale brute (à l’exclusion des installations de méthanisation d’eaux usées ou de boues d’épuration urbaines lorsqu’elles sont méthanisées sur leur site de production) ;
  • les installations photovoltaïques d’une puissance égale ou supérieure à 5 MW ;
  • les gites géothermiques ;
  • les installations hydroélectriques d’une puissance égale ou supérieure à 3 MW ;
  • les ouvrages des réseaux publics de transport et de distribution d’électricité.

L’article R. 311-6 du code de justice administrative nouvellement créé fixe à deux mois le délai de recours à l’encontre de ces décisions, celui-ci n’étant pas prorogeable par l’exercice d’un recours administratif. Ce nouvel article prévoit également un délai d’instruction maximal de dix mois avec saisine automatique de la juridiction de rang supérieur à l’issue de ce délai. Si le tribunal administratif ne s’est pas prononcé dans ce délai de dix mois à compter de l’enregistrement de la requête, le litige est porté devant la cour administrative d’appel qui dispose par la suite elle-même d’un délai de dix mois pour statuer. Le conseil d’Etat est finalement saisi si la cour ne statue pas dans le délai imparti.

 

Le gouvernement présente un projet de loi pour accélérer la construction de nouveaux réacteurs nucléaires de type EPR2.

Présenté le 2 novembre 2022 en conseil des ministres, ce nouveau projet de loi [3] s’inscrit dans le cadre de la stratégie énergétique portée par le gouvernement depuis plusieurs mois. Il vise à relancer la filière nucléaire en particulier via la construction dans les prochaines années de six réacteurs à eau pressurisée de génération III+, dit « EPR 2 ».

Le texte prévoit notamment la possibilité de construire de nouveaux réacteurs électronucléaires en bord de mer à proximité immédiate ou à l’intérieur du périmètre d’un réacteur électronucléaire existant par dérogation à la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral dite « loi littoral ».

Il sera discuté par le Parlement à compter de début 2023. Nous nous tenons naturellement à votre disposition pour toute précision complémentaire sur ce projet de loi, et plus largement s’agissant du régime juridique applicable aux installations de production d’énergie d’origine nucléaire.

 

Le conseil d’État rejette le recours formé contre l’instruction du 26 mai 2021 de la ministre de la transition écologique relative à la planification territoriale et à l’instruction des projets éoliens.

Conseil d’État du 29 novembre 2022, n° 453340

Le gouvernement publie très régulièrement des circulaires ou instructions à l’attention des préfets pour leur demander d’accélérer l’instruction des demandes d’autorisation d’exploiter des installations de production d’énergies renouvelables, et notamment de parcs éoliens. Ces instructions sont le plus souvent des documents de portée générale qui ne produisent pas d’effets juridiques particuliers sur les tiers extérieurs à l’administration.

Par sa décision du 29 novembre 2022, le conseil d’Etat a rejeté un recours pour excès de pouvoir formé par une association de défense de l’environnement à l’encontre de l’instruction du 26 mai 2021, par laquelle la ministre de la transition écologique invitait les préfets à adopter plusieurs mesures telles que l’élaboration d’une cartographie non contraignante des zones favorables au développement éolien ou la création de pôles éoliens départementaux et régionaux. Le conseil d’Etat a rappelé les conditions de recevabilité applicables aux recours pour excès de pouvoir formés à l’encontre de documents administratifs de portée générale. Après avoir relevé que « l’instruction attaquée se born[ait] à prescrire aux préfets de région différentes tâches en lien avec l’action administrative en matière d’énergie éolienne terrestre », il en a déduit que le texte n’était pas susceptible « d’avoir des effets notables sur les droits ou la situation d’autres personnes que les agents chargés, le cas échéant, de les mettre en œuvre ». Le conseil d’Etat a donc jugé le recours irrecevable.

Cette décision du conseil d’Etat rappelle ainsi qu’il est inutile de former un recours contre des documents de portée générale qui ne produisent pas d’effet de droit pour des tiers extérieurs à l’administration.

[1] Art. 122 TFUE « Sans préjudice des autres procédures prévues par les traités, le Conseil, sur proposition de la Commission, peut décider, dans un esprit de solidarité entre les États membres, des mesures appropriées à la situation économique, en particulier si de graves difficultés surviennent dans l’approvisionnement en certains produits, notamment dans le domaine de l’énergie […] ».

[2] Voir notre précédente Newsletter Energie – Environnement – Octobre 2022

[3] Projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.