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27.06.2019Anne-Solène Hardouin, Jean-Philippe Minaud, Jean-Pierre Delvigne, Jérome Michel

Newsletter Energie et Environnement – Juin 2019

Energie

Le projet de loi relatif à l’énergie et au climat décline les orientations fixées par la programmation pluriannuelle de l’énergie et prévoit notamment :

  • Une simplification de l’évaluation environnementale (article 4).

À l’heure actuelle, un projet peut être soumis à évaluation environnementale (i) soit automatiquement ou (ii) soit après examen au cas par cas. À ce titre, l’examen au cas par cas (en amont de l’évaluation environnementale), comme l’évaluation environnementale, sont confiées à une seule et même entité : l’autorité environnementale.

Le projet de loi a vocation à distinguer les deux missions en conservant l’autorité environnementale comme autorité en charge de l’évaluation environnementale, tout en confiant l’examen au cas par cas à une autorité distincte.

  • Un dispositif de lutte contre la fraude aux certificats d’économie d’énergie (« CEE ») (article 5).

Pour rappel, une obligation de réalisation d’économies d’énergie est imposée aux vendeurs d’énergie (les « obligés »). Ces obligés reçoivent des CEE[1]:

  • en contrepartie, soit des actions d’économie d’énergie qu’ils mènent auprès des utilisateurs, soit de leur contribution à des programmes d’économie d’énergie ; ou
  • en achetant des CEE après d’autres acteurs.

Face à la très forte augmentation des obligations d’économies d’énergie (et donc des CEE), les contrôles des autorités sont de plus en plus réduits, laissant se multiplier des fraudes au mécanisme des CEE.

Pour endiguer ce phénomène, le projet de loi a proposé plusieurs pistes. Cependant, le conseil d’État les a rejetées considérant que l’ensemble du dispositif proposé n’était pas suffisamment précis.

  • Consultation de la CRE sur les prestations annexes réalisées à titre exclusif par les gestionnaires de réseaux de distribution d’électricité

En plus de l’acheminement de l’électricité sur les réseaux publics de distribution[2], les gestionnaires de réseaux peuvent réaliser des prestations annexes[3] :

  • Si elles relèvent du champ concurrentiel : le prix est librement défini par le gestionnaire de réseau et elles ne doivent en aucun cas être financées par le TURPE.
  • Si elles sont réalisées à titre exclusif : elles sont couvertes soit entièrement par le TURPE, soit en partie par le TURPE et complétées par le prix de la prestation. Dans ce dernier cas, il appartient à la CRE de définir les méthodes de calcul du prix de ces prestations et de se prononcer sur les évolutions éventuelles.

C’est dans ce cadre que la CRE a ouvert une consultation sur l’évolution des prestations annexes et des tarifs sur la base des propositions des gestionnaires de réseaux suivantes :

  • Proposition d’Enedis d’instituer une prestation gratuite de transmission des données du compteur à J+1.
  • Proposition d’Enedis de mettre en place une prestation (moyennant un prix variable) des données infrajournalières.

Sur ce point, la CRE recommande de rendre cette prestation gratuite.

  • Proposition d’Enedis de créer une nouvelle prestation (moyennant un prix variable) de modification de puissance de raccordement pour les installations en basse tension d’une puissance inférieure ou égale à 36 kVA.
  • Modification des conditions de l’obligation d’achat pour le biométhane: Décret n° 2019-398 du 30 avril 2019 et arrêté du 30 avril 2019

Le décret et l’arrêté du 30 avril 2019 ont apporté des précisions sur les conditions dans lesquelles une installation de biométhane peut bénéficier de l’obligation d’achat.

À titre d’exemples, ces textes imposent :

  • une durée de validité de 3 ans de l’attestation ouvrant droit à l’achat du biométhane pour toute nouvelle installation (article R. 446-3 du code de l’énergie).
  • Modification des conditions d’éligibilité à l’obligation d’achat et au complément de rémunération pour les installations de gaz de décharge ou d’incinération des ordures ménagères: Décret n° 2019-527 du 27 mai 2019

Ce décret réduit encore le champ d’application du contrat de complément de rémunération, en guichet ouvert :

  • Pour les installations produisant de l’énergie à partir du traitement thermique des déchets ménagers : le contrat de complément de rémunération n’est désormais plus possible[4].
  • Pour les installations de biogaz issu de stockage de déchets non dangereux :
    • le renouvellement du contrat de complément de rémunération n’est dorénavant plus envisageable[5].
    • lorsque l’ensemble des demandes de contrat d’achat ou de contrat de complément de rémunération aura atteint les 60 MW (et, en tout état de cause, avant le 31 décembre 2020), il ne sera plus possible de bénéficier de l’obligation d’achat pour ces installations, dans le cadre du guichet ouvert.
  • Consultation de la CRE sur les procédures de raccordement aux réseaux publics de transport et de distribution d’électricité jusqu’au 5 juillet 2019

La CRE s’interroge sur les nouvelles conditions de raccordement qu’elle envisage, à savoir notamment :

  • Instaurer une procédure de traitement unique des demandes de raccordement sans distinction entre la consommation et la production.
  • Créer des opérations de raccordement permettant de réduite les couts et délais de raccordement en contrepartie d’une limitation de puissance d’injection pour une installation de production.
  • Améliorer les délais de traitement des demandes de raccordement en créant une demande anticipée de raccordement qui permettrait d’émettre une proposition de raccordement avant complétude du dossier.
  • Inscrire dans la procédure de raccordement l’obligation de chiffrer, dès l’instruction de l’autorisation d’urbanisme, la contribution au raccordement due par les collectivités[6].

Des interrogations sur l’évolution des dispositions actuelles sont également ouvertes à la consultation et notamment :

  • Des mises à jour plus fréquentes des informations à disposition des demandeurs du raccordement.
  • L’amélioration de l’encadrement de la maitrise d’ouvrage déléguée pour les travaux de raccordement.
  • Simplification de la procédure d’élaboration des schémas de raccordement au réseau des énergies renouvelables: ordonnance n° 2019-501 du 22 mai 2019

L’ordonnance du 22 mai 2019 simplifie les procédures d’élaboration des schémas régionaux de raccordement au réseau des énergies renouvelables (S3REnR).

Le rapport d’accompagnement de cette ordonnance rappelle que ces schémas permettent de « préparer et de mutualiser les capacités de raccordement des énergies renouvelables nécessaires pour atteindre les objectifs fixés » et « de mutualiser le cout des ouvrages électriques »[7].

Deux modifications sont ainsi apportées à la procédure d’élaboration des S3REnR :

  • La capacité est désormais fixée par l’autorité locale. Ce changement permettra que cette capacité soit en cohérence avec le développement des énergies renouvelables sur le territoire et non imposé pour atteindre un niveau de raccordement fixé par l’Etat ou les gestionnaires de réseaux.
  • Le S3REnR n’aura plus à être approuvé par le préfet, ce qui permettra de faciliter les révisions pour s’adapter au fur et à mesure aux demandes de raccordement.

Environnement

Dans sa décision du 27 mai 2019, le conseil d’Etat apporte des précisions sur les modalités de régularisation d’un avis de l’autorité environnementale.

En l’espèce, le préfet de région avait à la fois, (i) émis un avis en qualité d’autorité environnementale sur l’implantation d’éoliennes et (ii) autorisé leur construction en qualité d’autorité d’instruction[8]. En tant que telle cette  « double casquette » ne pose pas de difficulté dès lors qu’ « une séparation fonctionnelle [est] organisée au sein de cette autorité, de manière à ce qu’une entité administrative, interne à celle-ci, dispose d’une autonomie réelle […] »[9].

Cependant, en l’espèce, l’autonomie réelle du service ayant émis un avis en qualité d’autorité environnementale n’était pas garantie, ce qui a conduit le conseil d’Etat à censurer les permis de construire.

La haute juridiction administrative considère cependant que ce vice peut être régularisé en reprenant la procédure de consultation. Ainsi pour assurer une véritable séparation[10], elle recommande que « l’avis [soit] rendu par la mission régionale de l’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable territorialement compétente, dans les conditions définies aux articles R. 122-6 à R. 122-8 et R. 122-24 du code de l’environnement ».

 

[1] Article L. 221-7 du code de l’énergie.

[2] Dont le financement est assuré par le tarif d’utilisation des réseaux publics e distribution (TURPE).

[3] Article L. 341-3 al. 2 du code de l’énergie.

[4] Suppression du 2° de l’article D. 314-23 du code de l’énergie.

[5] Suppression de l’article D. 314-25 du code de l’énergie.

[6] Pour l’heure, seule la part du raccordement incombant au bénéficiaire de l’autorisation d’urbanisme est fixée par le gestionnaire de réseau. S’agissant de la part incombant à la collectivité, seule une estimation indicative est donnée par le gestionnaire de réseau.

[7] Rapport relatif à l’ordonnance n° 2019-501 du 22 mai 2019 portant simplification de la procédure d’élaboration et de révision des schémas de raccordement au réseau des énergies renouvelables.

[8] La procédure s’est déroulée avant que le conseil d’Etat ne censure les dispositions de l’article R. 122-6 du code de l’environnement en tant qu’elles ne garantissaient pas la séparation fonctionnelle découlant de l’article 6 § 1 de la directive du 13 décembre 2011.

[9] CE, 6 décembre 2017, n° 400559.

[10] A défaut de désignation d’une nouvelle entité comme autorité environnementale par le pouvoir décrétal, suite à la censure de l’article R. 122-6 du code de l’environnement par le conseil d’Etat (CE, 6 décembre 2017, n° 400559).